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Maltraitance.
5 décembre 2006

Briser le silence.

mains

Il y a plusieurs sortes de prisons. Les matérielles, avec des barreaux.

Et celles que personne ne voit. Les pires, peut-être. Parce que personne ne sait que l'on est en prison, ou parce que ceux qui le savent ne veulent pas qu'on en sorte.

Souvent, quand on veut se tirer du carcan imposé par la famille ou les proches, on se fait rattraper vite fait, et on continue à crever, en silence.
Ou alors on préfère y rester. Parce qu'on n'ose pas. Parce qu'on ne sait pas que ce n'est pas normal, parce qu'on ne se rend pas compte. Ou alors parce qu'on n'a personne pour nous écouter. Parce qu'on a honte. Parce qu'on crève de trouille ou parce qu'on se dit que le silence protège.

Le silence tue. Ce silence-là, en tout cas.

Oser, c'est difficile. Les conséquences, elles le sont aussi. On se dit que si on parle la vie va s'effondrer. Mais si on en arrive à ce niveau de réflexion, c'est parce que, peut-être, notre vie s'est déjà effondrée.

Les autres devinent peu. Parce qu'ils n'osent pas y penser. Et beaucoup fuient. Beaucoup de ceux que l'on aurait pu. Ou alors on pense n'avoir personne.
Pourtant, parfois, c'est quand on les attend le moins que les gens pointent le bout de leur nez, ou tendent une main, tout simplement. Parfois aussi ceux que l'on n'aurait jamais imaginé.

Parler, ce n'est pas tout dire d'un coup. C'est juste dire, le tout. Pas obligé de donner des détails. Les mots maltraitance, viol, inceste, suffisent souvent.
Parler, ça peut aussi être l'écrire. Et le faire lire à quelqu'un.

Briser le silence, parce que le seul moyen de s'en sortir.

J'y croyais pas avant, c'est vai. Pourtant, on me l'avait déjà dit. Et un jour je l'ai fait, et de la descente vers la mort j'ai entr'aperçu la vie. La vraie, pas celle d'avant, pas la survie.
Je n'ai pas parlé, j'ai choisi d'écrire. Cinq minutes avant, je ne pensais pas le faire. C'est venu d'un coup. Il fallait, juste.

Oui, c'est dur. Oui, on a peur du regard. J'ai cru que j'allais mourir d'une crise cardiaque en donnant le papier à lire.
J'en suis sortie vivante. Juste, j'étais soulagée.

Le silence, c'est un engrenage duquel il est difficile de sortir. Parce qu'on nous dit et redit qu'il faut fermer sa gueule. Parce qu'on a toujours fonctionné comme ça et que souvent, on ne connait rien d'autre.

C'est faux. Ils n'ont pas toujours raison. Ils n'ont aucun droit sur nous. Juste celui de nous respecter. A partir du moment où ils dépassent ce droit, nous ne leur devons plus rien.

Ils sont coupables.

Eux. Juste eux. Ceux qui font, pas ceux qui subissent.

Parler, c'est notre droit, notre seul droit. Il n'est jamais trop tard, mais il n'est jamais trop tôt non plus.

Gueuler. L'ouvrir. C'est notre seule arme, mais la plus efficace de toutes. La seule qui fait peur.

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